En japonais, juku signifie « lieu d’études ». C’est un mot très usité dans la langue japonaise. La forme la plus courante de juku est sans doute ce que nous appellerions en français les cours du soirs intensifs : un lieu où les élèves qui ont fini les cours de la journée se rendent pour continuer à étudier. Au Japon, on réalise à quel point l’éducation est importante quand on voit le nombre conséquent de cours du soir intensifs : toutes les villes en comptent littéralement des dizaines, et de très nombreux étudiants s’y rendent, tous prêts à investir du temps et à faire ce qu’il faut pour prendre de l’avance scolairement parlant. Pourquoi les Japonais sont-ils aussi investis dans leurs études ? Un rapide coup d’œil à ce phénomène que sont les cours du soir intensifs va nous permettre de mieux comprendre ce pan fascinant de la culture japonaise.

Comme c’est le cas dans la plupart des pays, l’éducation était à l’origine un privilège réservé aux élites japonaises. Cependant, l’art de la lecture, de l’écriture ainsi que l’arithmétique se répandirent progressivement, jusqu’à l’époque d’Edo, durant laquelle deux siècles de paix permirent à l’industrie de prospérer. Savoir manier les chiffres et avoir la capacité de mémoriser des connaissances devint alors essentiel, et l’éducation se propagea rapidement. Au cours de cette période, le Japon avait un des taux d’alphabétisation les plus élevés au monde. Pendant l’ère Meiji, de 1868 à 1912, le Japon s’ouvrit à l’influence occidentale et réforma son système éducatif pour qu’il soit plus à l’image de ceux existant en Europe et aux Etats-Unis. Au sommet de ce système se trouvait l’université. Aujourd’hui encore, elle demeure l’élément le plus important de la vie des étudiants. On dit que l’université dans laquelle on est scolarisé a un impact majeur sur la carrière que l’on mènera. C’est probablement après la seconde guerre mondiale que cette idée s’est répandue, à une époque où la croissance du Japon était très rapide. Les entreprises allaient chercher leurs futurs employés jusque dans les universités, et, année après année, certaines institutions étaient considérées comme meilleures que les autres. Il existe encore aujourd’hui un classement, et la pression qui pousse les étudiants à intégrer les universités les mieux classées est énorme. C’est la raison pour laquelle la plupart des étudiants choisissent de se rendre aux cours du soir intensifs.

Les cours du soir intensifs les plus courants sont ceux qui préparent les lycéens aux examens d’entrée à l’université, bien qu’il existe des cours de « bachotage » pour l’entrée en lycée, et même pour l’école primaire ! On estime qu’environ 40% des enfants de dernière année d’école primaire suivent des cours du soir intensifs, et que plus de 65% des lycéens de terminale font de même. Les cours supplémentaires ne sont pas réservés aux intellos !

Les Occidentaux peinent à comprendre pourquoi les Japonais s’investissent tant dans leurs études. À peine les cours terminés au lycée, aller suivre des cours du soir intensifs trois heures durant, puis rentrer à la maison et faire ses devoirs jusqu’à minuit passé, et ce tous les jours, ne tente pas grand monde. Mais dans la société japonaise, il est très difficile de se détacher du lot. La population est nombreuse, et les étudiants qui n’obtiennent pas les résultats escomptés sont laissés de côté. À vrai dire, seulement trois étudiants sur dix en moyenne sont admis dans l’université de leur choix, et cette proportion est encore plus faible pour les universités les plus cotées. Au Japon, l’université où on étudie a à coup sûr une influence majeure sur la carrière à venir, et donc, à terme, sur le bonheur.

On critique parfois les cours du soir intensifs parce qu’ils se concentrent trop sur les examens. Il est vrai que lorsqu’on va en cours de bachotage, l’objectif principal est de réussir l’examen d’entrée de l’université qu’on souhaite intégrer, mais d’aucuns avancent qu’il est bien plus utile d’apprendre aux étudiants à apprendre, et de les aider à devenir des individus complets, plutôt que de se contenter de les préparer à un examen. Certains juku se focalisent moins sur le bachotage, et encouragent les étudiants à poser plus de questions, à réfléchir par eux-mêmes et même à faire le ménage dans leur salle de classe, leur permettant ainsi d’acquérir des compétences pratiques qui leur seront utiles bien après leurs examens d’admission à l’université. 

Cependant, les juku ne sont pas seulement destinés aux lycéens qui espèrent intégrer l’université. Au Japon, certains adultes, que ce soit à la suite d’événements malheureux, à cause de la guerre ou de la pauvreté, n’ont pas été en mesure de suivre une scolarité normale. Être illettré dans un pays ou la quasi-totalité de la population sait lire et écrire peut être très difficile à vivre. Certaines associations caritatives donnent des cours du soir pour tenter de remédier à ce problème, afin de donner aux adultes qui n’en ont jamais eu la possibilité d’apprendre à lire et à écrire. Les enseignants tirent tout autant de satisfaction de leur succès que lorsqu’un étudiant brillant intègre l’université de son choix. 

Les cours du soir intensifs font partie intégrante de la culture japonaise. Même s’ils ont des approches de plus en plus modernes et humaines, ils restent principalement concentrés sur le bachotage. Avec le déclin progressif de la population, le nombre de cours du soir intensifs est moindre, car les besoins décroissent, mais la proportion d’étudiants qui les suivent reste élevée, et ils espèrent tous obtenir les meilleurs résultats afin d’entrer dans la meilleure université. Dans la société japonaise, si vous souhaitez réussir, il vous faudra impérativement passer par un cours du soir intensif !

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Ecrit le 29 oct. 2015, 21:44:39	#15
Luluf4 J'ai vu un documentaire sur internet sur la scolarité coréenne. Il y avait une lycéenne qui dormait 4 à 5 heures par nuit et une petite fille de 6 ans qui préférait étudier plutôt que s'amuser

Ecrit le 30 nov. 2014, 13:05:28	#14
Laujeanne Les cours sont sur quelle durée?

Ecrit le 19 avr. 2014, 16:50:50	#13
Loulilou C'est quand même assez triste de subir une telle pression. Surtout en primaire ! (Et même après). En tout cas, si certains juku place l'individu au centre en quelque sorte au lieu de la réussite c'est déjà un bon début. Merci pour cet article vraiment intéressant.

Ecrit le 8 févr. 2014, 12:02:49	#12
Element Loumia : Il faut multiplier les chiffres du tableau en question (encadrés en jaune) par 10000 pour voir ce que ça représente en yens. Je constate que ces sommes sont (généralement) plus importantes du côté des établissements privés mais je me demande si elles sont aussi équivalentes aux frais (obligatoires) de scolarité.

Ecrit le 6 févr. 2014, 13:00:24	#11
Loumia13 Merci.....

Ecrit le 4 févr. 2014, 23:16:10	#10
Administrateur Oui, c’est payant et c’est assez cher. J’ai trouvé un tableau qui nous parle des sommes moyennes annuelles dépensées par les étudiants japonais. Regarde le tableau en bas 学習塾費の金額分布の状況. http://www.jili.or.jp/lifeplan/lifeevent/education/8.html

Ecrit le 1 févr. 2014, 17:44:51	#9
Loumia13 eh ben ça fait pas envie.....et tout ces cours sont-ils payant?

Ecrit le 10 déc. 2013, 10:58:30	#8
FrankenFran Les étudiants japonais subissent une énorme pression au quotidien, ça doit être très dur... Il ne faut pas s'étonner qu'il fasse partie de ces pays contenant un grand taux de suicides D:

Ecrit le 22 août 2013, 16:24:56

#7

NiniShinigami C'est vrai qu'au Japon, on prête plus attention aux études qu'en Occident, et l'on devrait avoir la possibilité de faire ce genre de chose en France et rendre cela accessible, mais après c'est vrai que la plupart des élèves japonais peuvent ne pas le faire par choix, les parents peuvent mettre un peu de pression sur l'éducation de leurs enfants et ainsi les "pousser" à assister à ces cours malgré eux. Mais heureusement que ce genre de cours intensifs existent, car j'imagine que les cours Japonais sont beaucoup moins "cool" et plus sérieux qu'en France.

Ecrit le 25 juin 2013, 14:54:07	#6
Xehanort Et il y a la pression des parents également.

Ecrit le 23 mai 2013, 14:53:11	#5
Xexe91 Il me semble que la scolarité au Japon est très compliquée jusqu'à l'entrée à l'université, enfin je crois. Alors, je comprends que les jeunes japonais prennent des cours du soirs pour y arriver. Ils ont bien du courage :D

Ecrit le 14 mars 2013, 10:15:15

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Shiroiookami C'est franchement compréhensible que toutes ces personnes tentent d'avancer plus vite. Au Japon c'est la course pour l'emploi et si l'on considère que les programmes scolaires sont structurés par âge, il est évident que cela ralenti beaucoup la démarche des plus jeunes qui ne peuvent pas encore lire tout ce qu'ils veulent. Donc je suppose qu'arrivé à un certain âge, le jeune japonais doit mettre un coup de collier pour avancer, dès qu'il est capable d'accéder à des lectures plus fournies. Certains doivent bien galérer quand même !!!!!

Ecrit le 4 mars 2013, 18:35:24	#3
Gwendolynn j'admire tout ses élèves japonais qui apprennent même après les cours ! je trouve qu'il ont beaucoup de courage :D moi seulement après une journée de cours je suis fatiguée de toute ses leçons :o mais je voulait demander la bas sa existe les classe professionnel ? au lycée on les appel les bac pro :) ou il y a que des générals ?

Ecrit le 14 déc. 2012, 14:36:18	#2
Tsukiyo55 Cependant (j'ai oublié) ce qui serait interessant c'est de savoir le système de notation des professeur au japon, leurs emplois du temps etc :) !

Ecrit le 14 déc. 2012, 14:34:35	#1
Tsukiyo55 Ma correspondante japonais ne peut jamais communiquer sur skype avec moi en semaine, elle rentre très tard le soir. C'est pourquoi elle m'envoie un petit message pour prendre de mes nouvelles !

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